Traduction :
La plupart des acteurs y réfléchiraient à deux fois avant de défoncer une porte vitrée.
Mais pour Jennifer Lawrence, c'était un mardi comme les autres sur le tournage de « Die My Love » (en salles le 7 novembre), où elle incarne Grace, une jeune maman imprévisible, désabusée par sa vie paisible à la campagne. Désespérée de ressentir à nouveau des émotions, elle se fracasse la tête contre un miroir, saccage des étagères et du papier peint, et provoque un accident de voiture en brandissant un préservatif devant son compagnon inattentif, Jackson (Robert Pattinson).
Une performance sauvage et intense qui place l'actrice, quatre fois nommée aux Oscars, parmi les prétendantes aux récompenses, après avoir remporté l'Oscar de la meilleure actrice pour « Happiness Therapy » en 2012.
« Tout le monde me dit : “Oh mon Dieu, ça doit être tellement dur !” », confie Lawrence, assise avec Pattinson dans un hôtel de luxe dans le centre de Manhattan. « En réalité, c’est vraiment amusant, car aucune des conséquences décrites dans le scénario ne correspond à ma vie. Je peux faire appel à cette énergie et à cette adrénaline, puis ils crient “Coupez !” et je suis aux anges. Je peux vivre ces pensées intrusives à voix haute. »
Adapté du roman d'Ariana Harwicz paru en 2017, « Die My Love » dépeint avec une force saisissante la descente aux enfers de Grace, plongée dans la dépression post-partum et l'isolement. Jennifer Lawrence, 35 ans, a découvert le livre sur les conseils de Martin Scorsese (producteur du film) et a immédiatement pensé au poignant « Une femme sous influence » de John Cassavetes.
« La manière dont le film construit cette expérience psychologique est tellement réaliste qu'on a presque l'impression de lire dans les pensées de Gena Rowlands », qui incarnait le rôle principal dans le film de 1974, confie-t-elle.
Les appels à l'aide de Grace sont largement ignorés par Jackson, dont le désintérêt croissant pour le sexe et les voyages fréquents la font soupçonner d'infidélité. Elle aussi commence à être attirée par un mystérieux motard (LaKeith Stanfield) qui rôde autour de leur propriété. Pattinson, 39 ans, a salué les efforts de la réalisatrice et co-scénariste Lynne Ramsay pour mieux cerner Jackson, qui est bien mal équipé pour aider Grace face à ce qu'elle traverse.
«Dans le livre, il est surtout un instrument à sa disposition ; il est comme une ombre », explique Pattinson. « Mais plus j'avançais dans ma lecture, plus je me disais : “On peut être une mauvaise personne pour quelqu'un, sans pour autant être une mauvaise personne.” »
« Die My Love », le dernier film en lice pour les Oscars cette saison, aborde les difficultés physiques et psychologiques de la maternité, ainsi que la peur de perdre son identité. « One Battle After Another », « The Testament of Ann Lee », « Hamnet » et « If I Had Legs I’d Kick You » explorent des thèmes similaires, ce que Lawrence considère comme loin d'être une simple coïncidence.
« C'est probablement lié au fait que la dépression post-partum est enfin un sujet abordé dans notre société », explique Lawrence, soulignant que la sensibilité du public sur ce sujet ne grandit que depuis ces vingt dernières années. « Maintenant que nous savons qu'il existe des traitements et que nous posons des questions à ce sujet, il est logique que cela s'invite dans les débats artistiques. »
Jennifer Lawrence a un fils de trois ans, Cy, avec son mari, le galeriste Cooke Maroney, et ils ont accueilli leur deuxième enfant en début d'année. Pattinson, quant à lui, a une fille de 18 mois avec sa compagne, la chanteuse et actrice Suki Waterhouse. Ces expériences ont nourri leur jeu d'acteur, notamment la manière dont Grace et Jackson interagissent avec leur jeune fils. Alors que les personnages sont dépeints comme des parents négligents dans le roman de Harwciz, Jennifer Lawrence souhaitait montrer qu'ils aiment profondément leur enfant.
« L’idée fausse la plus répandue concernant le post-partum, c’est qu’on n’arrive plus à créer de lien avec son enfant et qu’on ne l’aime plus », explique Lawrence. En réalité, « il arrive souvent que les deux parents aiment tellement leur enfant qu’ils finissent par se détester, car l’enfant est la seule chose parfaite dans leur relation. C’est un sujet tellement sensible qu’il est facile de se disputer à ce sujet.
« Avant d’avoir des enfants, sur quoi se disputait-on avec son/sa partenaire ? Où aller dîner ? Qui a dit quoi pendant une dispute ? », ajoute-t-elle. « Quand on est en désaccord sur ce qui est le mieux pour son enfant, c’est une véritable dispute, sérieuse et angoissante. »
La complicité décontractée entre Lawrence et Pattinson est pleinement visible le lendemain d'Halloween, lorsqu'elle raconte sa chasse aux bonbons avec Cy, qui insistait pour se déguiser en feu tricolore mais s'est lassé au bout de 10 minutes. (« Je lui ai dit : "J'ai passé des mois à travailler sur ton costume, mais bon, allons-y !" », plaisante Lawrence.)
Elle taquine Pattinson sur son habitude d'appeler sans prévenir via FaceTime (« Il se prend pour un jeune de la génération Z »), et se souvient de l'avoir « saboté » avec des « rires incontrôlables » avant de tourner des scènes intenses et émouvantes.
« C'est très étrange de voir comment tu travailles », dit Pattinson avec bienveillance, décrivant comment elle se concentre immédiatement dès que les caméras commencent à tourner. « J'ai toujours été très impressionné par ta capacité à te mettre en mode automatique. Ton talent pour improviser est incroyable. »
« Die My Love » a été tourné à la fin de l'été dernier à Calgary, en Alberta, au Canada. Bien que le tournage ait pu donner l'impression d'être une véritable cocotte-minute, la star de « Batman » ne garde que de bons souvenirs des semaines de tournage et de ses week-ends à Los Angeles pour retrouver Waterhouse et leur fille.
« Le bébé était comme une petite patate rigolote, elle était si jeune à l'époque », se souvient Pattinson en souriant. « C'était une période vraiment merveilleuse. Et puis, être à la campagne, admirer ces magnifiques levers de soleil sans cesse… c'était idyllique. »
Lawrence était enceinte de son deuxième enfant pendant le tournage, Maroney et Cy sont restés avec elle tout au long de la production. Elle n'a jamais craint de ramener à la maison la mauvaise humeur de Grace.
« Je passe d'un état à l'autre sur le plateau », explique Lawrence. « Cy s'était habitué à me voir avec du sang sur le visage, et il adorait s'asseoir sur la moto de LaKeith. Mon mari et mon fils jouaient avec, et c'était la "moto de l'infidélité" (rires).
« Ma famille, disait "Santé !" et "Cheese !" en jouant dessus. J'ai toujours trouvé ça très drôle."

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