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jeudi 14 mai 2020

Nouvelles photos et interview de Robert Pattinson pour le magazine GQ

Confinement oblige, Robert  s'est photographié lui-même pour le magazine et ça vaut le détour !


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Update : Ajout de la traduction de l'interview :

10 avril 10:02 a.m. PST // 6:02 p.m. GMT

Robert Pattinson : [Flou, pixelisé, pas rasé] Je ne sais pas comment cela va fonctionner. Mon téléphone est cassé, Internet aussi, tout est cassé. Je me dis, "Quoi, pourquoi tout se met à jour et comment arrêtez-vous la mise à jour ?"

GQ : [flou, pixelisé, pas rasé] Vous ne pouvez rien mettre à jour. C'est dangereux. 
Je sais. Je ne crois pas avoir déjà appuyé sur le bouton "mettre à jour" dans ma vie. Je le diffère toujours au lendemain. 

Ne jamais mettre à jour ! 
Attendez, laissez-moi essayer avec mon, laissez-moi essayer de connecter mon - ah, en fait, vous savez quoi ? Je ne vais même pas essayer de mettre en Bluetooth. Je vais couper le son à l'ancienne. Mes écouteurs. Hum, comment ça va ? Où êtes-vous ?

L'autre jour - ou était-ce la semaine dernière ? il y a un mois ? Robert Pattinson lutte avec les jours et les dates, même dans les meilleures circonstances - la production de The Batman, que Pattinson filmait, a été interrompue, tout comme la majeure partie de la civilisation humaine. "J'ai presque immédiatement perdu la notion du temps," dit Pattinson. Il a eu ce sentiment, celui que nous avons tous désormais, de se débattre avec l'espace, l'anxiété et l'histoire. Il dit que ce sentiment était très familier. "Beaucoup de gens se plaignent de cela à mon sujet. Ce total...Je n'ai pas la notion du temps. Je pense que quelque chose qui s'est passé il y a deux ans pourrait en fait avoir eu lieu la semaine dernière. C'est quelque chose dont on se plaint par rapport à ma personnalité." Il dit que trois personnes différentes l'ont appelé, pour lui rappeler de me contacter. 

Il est à Londres avec sa petite-amie, dans l'appartement que les gens de Batman ont loué pour lui. Il mange toujours les plats que lui fournissent les gens de Batman, bien que l'autre jour il était nerveux, qu'ils puissent simplement arrêter ou oublier. Où que les propriétaires de son appartement en aient besoin ? Il est venu à Londres avec trois T-Shirts. Le reste de ses affaires, dit-il, est chez lui à Los Angeles, où il vit réellement. Son Internet à Londres marche par intermittence. Son ordinateur portable ne marche pas la plupart du temps. Il a deux téléphones, dont l'un a du réseau, et donc tout le système fonctionne actuellement avec les deux ou trois barres qu'un des téléphone capte quand il y arrive : "Chaque appareil fonctionne sur cette 3G, comme l'iPhone 4."

Le studio de cinéma a engagé un coach qui a laissé à Pattinson un ballon Bosu, un poids et l'a appelé sincèrement à utiliser les deux, mais pour le moment, dit-il, il l'ignore. "Je pense que si vous vous entraînez tout le temps, vous faites partie du problème," dit-il en soupirant. Par "vous", il entend les autres acteurs. "Vous créez un précédent. Personne ne faisait cela dans les années 70. Même James Dean - n'était pas vraiment musclé." Il raconte qu'à l'époque où il était la star de la franchise Twilight, "La seule fois où ils m'ont demandé de retirer ma chemise, je crois qu'ils m'ont dit de la remettre." Mais Batman est Batman. Pattinson a appelé une autre actrice du film, Zoë Kravitz, l'autre jour, et elle lui a dit qu'elle faisait de l'exercice 5 jours par semaine durant leur exil du plateau. Pattinson, eh bien : "Vraiment, je ne fais presque rien," dit-il en soupirant à nouveau.

Il est possible que vous ne puissiez pas trouver une personne plus adaptée à cette expérience. Pattinson, qui aura 34 ans en Mai, a passé sa vie d'adulte à se séparer du reste du monde. Il avait 21 ans quand il a été choisi pour le premier Twilight, dans le rôle du vampire principal, dans ce qui allait devenir 5 films de plus en plus populaires et qui parlent du désir adolescent dans le Pacifique Nord-Ouest. Le dernier épisode de la franchise, qui a transformé Pattinson et sa collègue, Kristen Stewart, en deux des personnes les plus célèbres du monde, est sorti en 2012 et a rapporté plus de 800 millions de dollars à travers le monde. Mais à cette période là, il était déjà pratiquement parti. 

Il jouait dans des films de David Cronenberg. Il était sur des plateaux de tournage en Australie, Canada, ou à New York, où il rôdait déguisé dans les rues, essayant de développer le bon accent pour Good Time de Josh et Benny Safdie. Il jouait des innocents, des battants, des outsiders, des gens qui en bavent, pleurent ou se branlent, dans des films de Werner Herzog, James Gray, Anton Corbijn. Il devenait, film par film, un des acteurs les plus intéressants du monde. Et quand il ne travaillait pas ? Il se cachait. Des paparazzi parfois. Du système des studios d'Hollywood à d'autres moments. Il errait dans des maisons trop grandes à Los Angeles, dans des quartiers où il ne pouvait pas sortir. "J'ai passé tellement de temps seul, parce que vous y êtes en quelque sorte obligé, que je ne me souviens pas de ce que c'était de ne pas avoir ce genre de style de vie," dit Pattinson. Maintenant il en parle à ses amis et sa famille, qui doivent faire la même chose. "Je réalise, qu'on est tous tellement vulnérable face à l'isolement," dit-il. "C'est assez choquant."

Claire Denis, qui a dirigé Pattinson dans High Life en 2018, dit qu'elle lui a envoyé un texto l'autre jour, pour voir comment il allait. "Je lui ai demandé si ce n'était pas trop terrible d'être confiné. Et il a répondu, "Oh non, Claire. Je peux le supporter." C'est tellement génial de pouvoir dire cela."

Pattinson a Tenet, réalisé par Christopher Nolan, qui est supposé sortir en Juillet. Il a un film plus petit, le gothique et noir The Devil All The Time, qui devrait sortir sur Netflix cet automne. Batman devait sortir l'été de l'année prochaine, mais a été repoussé à Octobre 2021. Après des années à éviter les films à gros budget et le feu des projecteurs qui viennent avec, Pattinson a fait plusieurs films énormes à la suite. Puis le monde s'est arrêté, et avec lui ses ambitions, aussi hésitantes qu'elles soient ou aient pu l'être. Pourtant, il a eu la chance de vivre cette expérience indemne, du moins jusqu'à présent. Il a eu la chance de savoir comment être seul, autant qu'une personne puisse l'être. 

Ce qu'il n'a pas encore compris, c'est comment faire autre chose, comme aller dehors. "Je suis allé courir au parc aujourd'hui," dit-il. "J'ai eu tellement peur d'être arrêté. Vous avez le droit de courir ici. Mais la terreur que j'ai ressenti est assez extrême." Il est nerveux de cette façon. De retourner dans le monde, quand le monde reviendra finalement ? Ce pourrait être la partie la plus dure. 

10 Avril 10:16 a.m. PST // 6:16 p.m. GMT

Pattinson : Hier, j'étais sur Google, je cherchais sur Youtube comment cuire des pâtes au micro-ondes. [Rires]

GQ : Cela ne se fait pas. 
Mettez-les dans un bol et au micro-ondes. Voilà comment cuire les pâtes au micro-ondes. Et ce n'est pas vraiment quelque chose qui se fait. C'est assez révoltant en fait. Mais je veux dire, qui aurait cru que cela les rendait vraiment dégoûtantes ? 

Comment survivez-vous ?
Je suis un régime alimentaire pour Batman. Dieu merci. Je ne sais pas comment je ferais sinon. Mais je veux dire, oui, à part cela - je survivrai. J'aurai des flocons d'avoine avec de la poudre protéiné à la vanille dessus. Et je les mélangerai à peine. C'est extraordinairement facile. Je mange directement dans des conserves. Je met du tabasco à l'intérieur d'une conserve de thon et je la mange dans la boîte. 

Vous vous êtes entraîné toute votre vie pour cela apparemment. 
Je... C'est bizarre, mais mes préférences sont... juste de manger comme un animal sauvage. [Rires] Directement dans une poubelle. 

Un jour, j'ai demandé à Robert Eggers, qui a dirigé Pattinson dans The Lighthouse sorti l'année dernière - dans lequel Pattinson incarne un homme poussé à la folie et à l'homicide aviaire, par l'isolement et la solitude - pourquoi il a choisi Pattinson dans son film. "Eh bien," a dit Eggers, dans sa propre solitude à Belfast, "cette qualité paranoïaque chez Rob que vous pouvez ressentir dans sa vie de tous les jours, je crois que c'est pour cela que Josh et Benny le voulaient pour Good Time et pourquoi je trouvais qu'il faisait sens dans The Lighthouse. Bien qu'il soit suffisamment bon pour pouvoir se transformer. Mais je pense que cette qualité paranoïaque est quelque chose de spécial pour lui."

Et vous la ressentez, cette qualité paranoïaque. Même lorsque vous le regardez à travers un écran, la distance et le temps. Pattinson a une énergie généreuse mais complètement chaotique. Aujourd'hui, il porte un bonnet noir Carhartt et un t-shirt blanc et il alterne entre du coca-cola et des morceaux de Nicorette - juste l'un après l'autre. "C'est tellement dégoûtant," dit-il gaiement. Il commence et arrête ses phrases comme un manège de carnaval cassé. Parfois, il place mal tellement de mots d'affilée, entrecoupés par des soupirs lourds et des rires nerveux, que vous pensez momentanément qu'il parle une langue entièrement différente. 

Pattinson est assez vieux maintenant pour admettre qu'il existe une méthode pour la façon nerveuse dont il aborde le contact humain, avec une arrière pensée derrière. "J'ai l'impression d'avoir besoin d'adrénaline simplement pour fonctionner," dit-il. "Sinon, je resterai assis là. Je suis un grog. Je me mets moi-même dans un état de tension nerveuse avant presque tout. J'ai le même processus à chaque rôle. Je vais être super excité, je vais avoir des tonnes d'idées sur les choses, et plus vous vous rapprochez du premier jour, c'est le même cycle où votre confiance disparaît complètement, vous vous détestez, puis vous cherchez des excuses. Vous recherchez une stratégie de repli avant même d'avoir commencé." Il dit que ses agents n'écoutent plus ses appels paniqués désormais. Ils lui disent : C'est juste ton processus. "Il a cette capacité très naturelle de donner l'impression que tout est chaotique, que c'est du freestyle, qu'il sort de la tempête et que c'est de l'instinct," dit John David Washington, avec qui il joue dans Tenet. "Mais il est très concentré sur ce qu'il essaie de faire, malgré ses histoires et ses sentiments."

Pattinson dit qu'il avait l'habitude de boire 5000 tasses de café avant des interviews comme celle-ci, de les faire, puis de s'effondrer ensuite "et de dormir durant deux jours." Il explique qu'il ne manquerait pas de dire la chose la plus folle à laquelle il puisse penser. "J'aimais dire des choses provocantes, car je trouvais que c'était drôle. Je suis très très mal à l'aise en faisant des choses sérieuses."

Soudain, il se précipite sur son ordinateur cassé. "Juste avant l'interview, j'essayais de trouver mes notes sur le film, et c'était-"

Cela m'a pris un moment pour réaliser ce qui se passait. Quelles notes ? Quel film ? Il s'avère qu'il parle de Tenet. Il se trouve qu'il parle des notes qu'il a écrit l'année dernière, quand il a commencé le film. "Quand je regardais les notes," dit Pattinson, "Je me suis dit, 'Oh ouais, ce sont de très bonnes notes.' C'est drôle, car j'ai complètement oublié, j'ai oublié beaucoup de choses sur le personnage. Avez-vous vu le film, au fait ?

"Non."

"Je ne l'ai pas vu non plus."

"Voulez-vous me dire de quoi il s'agit ?"

"Même si je l'avais vu, je ne sais vraiment pas si je pourrais... Je me disais justement, j'ai appelé mon assistant il y a 20 minutes : 'Qu'est ce que je dis ? Je ne sais pas.'"

"Qu'a répondu votre assistant ?"

"Elle est beaucoup plus intelligente que moi. Elle est allée à l'université. Et j'ai juste envie de dire toutes ces choses, et je me dis, 'oh mon dieu, non. Je ne peux pas dire de conneries.'"

Pendant une minute il a essayé pourtant. "Ce truc, c'est tellement fou," dit-il. Il dit qu'ils avaient une équipe de 500 personnes, et 250 d'entre eux voyageaient en avion tous ensemble, d'avion en avion, vers des pays différents. "Et dans chaque pays, il y a une scène de décors énorme, qui représente le point culminant d'un film ordinaire. Dans chaque pays." Il dit que des personnes de l'équipe fatiguées et mordues venaient durant leurs jours de congé pour regarder les effets spéciaux de Nolan, parce qu'ils étaient fous. Il s'excuse de ne pas pouvoir en dire plus. Il ne sait tout simplement pas quoi dire. 

Quelques jours plus tard, j'ai contacté Christopher Nolan lui-même, pour lui demander si Pattinson se fichait de moi sur le fait de ne pas connaître l'intrigue du film qu'il vient juste de finir. 

"Ce qui est intéressant avec Rob, c'est qu'il se fout légèrement de vous," dit Nolan, en riant d'un rire anglais réservé. "Mais il est aussi d'une honnêteté désarmante. C'est un peu des deux à la fois. Quand vous verrez le film, vous comprendrez. Rob a eu une lecture du scénario extrêmement précise. Mais il a également compris les ambiguïtés du film et les possibilités qui peuvent se dégager de l'histoire. Et donc les deux sont vraies. Oui, il se fout de vous, car il avait une complète compréhension du scénario. Mais une complète compréhension du scénario, dans le cas de Tenet, est celle qui comprend et reconnaît la nécessité pour ce film de vivre dans l'esprit du public et de suggérer des possibilités dans leurs esprits. Et il était vraiment le complice parfait pour ça."

10 Avril, 10:37 a.m. PST // 6:37 p.m. GMT
Pattinson : [essayant à nouveau de décrire l'intrigue de 'Tenet'] J'ai oublié beaucoup de choses sur le début du film. J'étais tellement obsédé par le fait de regarder les débats de Christopher Hitchens. Vous connaissez Christopher Hitchens ?

GQ : Bien sûr. 
Avec mon personnage, j'ai essayé de faire une imitation de Chris Hitchens, et j'ai complètement oublié que je faisais cela jusqu'à ce que je voie mes notes. Je suis tellement curieux. Je veux dire, Je n'ai pas vu une image du film.

Maintenant, j'imagine Christopher Hitchens en tant que voyageur du temps. 
Ce n'est pas un voyageur du temps. Il n'y a pas de voyage dans le temps en fait. [Rires] C'est la seule chose que je suis autorisé à dire. 

Juliette Binoche m'a envoyé un e-mail, essayant de décrire Pattinson et certaines phrases font sens pour moi ("Chaque fois que je vois Rob, je me sens toujours proche de lui. Cela n'a rien à voir avec le temps. Je vois sa solitude, son besoin de parler, son besoin de partager des expériences"), et je me pose des questions sur d'autres points. "Sa recherche de la vérité est acharnée," écrit-elle, et "cela explique aussi son besoin d'aller dans des mondes différents : le cinéma et les films." Je crois que en parlant de cinéma, elle veut dire les trucs hollywoodiens qu'il recommence à faire maintenant, par rapport aux films indépendants dans lesquels elle a joué avec lui au fil des années, en commençant par Cosmopolis en 2012.

Mais Pattinson vous dira rapidement que la séparation entre les deux n'est pas vraiment une séparation pour lui. Ce n'est pas qu'il n'est pas au courant de la perception qu'on a de lui, qu'il est un beau garçon qui a passé des années à répudier à la fois sa beauté et le fait qu'il soit un jeune premier. C'est juste qu'il n'est pas entièrement d'accord avec cela. "Quand je regarde les films Twilight," dit-il, "je trouve qu'à bien des égards, ils ressemblent plus à des films d'art et d'essai existentiels." Et puis, ce qui est venu ensuite, tous ces trucs qu'il a fait à l'opposé de Twilight - eh bien, il a fait tous ces films parce qu'ils étaient à son goût, non pas parce qu'il essayait de prouver quelque chose. "J'ai grandi en aimant les films classiques, puis j'aimais vraiment regarder des films quand j'étais adolescent," dit-il. "Je voulais travailler avec ces gens. Mais je ne savais pas que vous pouviez vraiment le faire."

Puis il a réalisé qu'il pouvait. Il s'est rendu compte que les directeurs de casting et Hollywood n'en savaient pas plus sur ce qu'il pouvait faire que lui, Robert Pattinson, ne savait. "Parce que vous êtes catégorisé assez rapidement simplement par votre apparence," dit-il. "Et donc si vous êtes un anglais, grand, aux cheveux flottants, que vous êtes allés dans une école privée et que vous commencez à jouer, vous faites des drames d'époque. Mais je n'aime pas les drames d'époque. Et donc vous vous battez contre cela." A un moment, me dit-il, il a compris qu'il recevait des rôles pour le gars blond, alors qu'il voulait être l'autre type : "J'ai toujours voulu les rôles qui sont proposés aux gars maigres avec des cheveux noirs."

Et c'est ainsi qu'il en est venu à jouer les rôles pour qui on faisait appel à des gars minces avec des cheveux noirs : le frère cadet pleurnichard (The Rover), l'aspirant hollywoodien et le suiveur (Maps to the stars, Life), l'explorateur dépenaillé (The Lost City of Z, High Life), et le petit escroc (Good Time).

"Pendant longtemps, j'ai aimé faire des rôles qui parlent d'insécurité, où l'énergie vient de l'insécurité," dit Pattinson. "Et puis c'est devenu un peu ennuyeux, donc j'ai voulu jouer le contraire, des gens qui n'ont absolument aucune honte et aucune peur. Et puis, ce sont des gens qui sont à l'avant-garde, qui prennent des décision dynamique. C'est étrange. Si vous continuez à jouer des rôles, cela commence à déteindre sur vous. Donc si vous continuez à jouer des perdants passifs, vous vous sentez un peu comme cela après."

Il est honnête sur le fait, qu'à certains égards, il faisait simplement correspondre son évolution psychologique en tant qu'être humain à son travail. Il évoluait à travers les rôles qu'il jouait, de quelqu'un qui avait l'impression de ne pas avoir sa place, à quelqu'un qui commençait à s'amuser en faisant ce qu'il faisait, à quelqu'un qui se sent, eh bien, en contrôle pour une fois. Et puis, l'année dernière, il s'est heurté à un mur. Pas sur son travail, mais dans sa vie, sa carrière.

"J'ai commencé le début de l'année dernière sans emploi. J'ai appelé mon agent et je me disais - j'ai eu de bonnes critiques dans certains trucs - et je me disais, "C'est quoi ce bordel ? Je pensais que c'était une très bonne année, et je commence l'année comme si je venais de faire de la merde.'" Et ses agents lui ont dit : tu n'es pas vraiment sur la liste. Cette liste mythique d'acteurs d'élites, considérés pour les rôles d'élites. Pas nécessairement parce qu'il n'était pas recherché. Mais parce que, lui ont-ils dit : "Tout le monde pense que tu ne veux plus faire ce genre de choses."

Mais Pattinson a réalisé qu'en fait, il le voulait. Il voulait plus de sécurité, moins de doute. "Juste quelque chose sur lequel vous pourriez compter un peu plus," dit-il, en soupirant. "J'étais confronté au problème que, même si j'adorais les films que je faisais, personne ne les voit. Et donc c'est un peu effrayant, car je ne sais pas si c'est viable pour une carrière... Je ne sais pas combien de personnes dans l'industrie sont réellement prêtes à vous soutenir sans aucune viabilité commerciale."

C'est à peu près à ce moment là, au début de l'année dernière, que Christopher Nolan, le seul réalisateur qui réalise des films d'art et d'essai - dans la singularité de leur vision et la pureté d'exécution - qui atteignent les plus hauts niveaux commerciaux d'Hollywood, a appelé. Nolan dit qu'il avait vu ce que Pattinson avait fait dans Good Time et The Lost City of Z et qu'il était fasciné. "Rob semblait être exactement au bon endroit dans sa carrière pour vouloir venir inventer avec moi," dit Nolan. Et Pattinson a découvert qu'il l'était. Il était à nouveau prêt à donner une chance à la liste.

Et ensuite, lors du premier jour de tournage de Tenet, Pattinson a également été choisi pour Batman.

10 Avril, 11:16 a.m. PST // 7:16 p.m. GMT

GQ : Puis-je demander pourquoi The Batman est quelque chose que vous vouliez faire ? Je peux penser à pleins de raisons de vouloir le faire. Mais je peux aussi, franchement, penser à pleins de raisons de ne pas vouloir le faire.
Pattinson : Quelles sont les raisons de ne pas le faire ? [Rires]

Eh bien, vous venez de jouer dans un film de Christopher Nolan; Nolan a déjà réalisé 3 films Batman emblématiques. De plus, je pense à vous comme étant un acteur assez spécifique, et Batman est un personnage archétype à jouer.
Je pense que parfois les inconvénients - auxquels j'ai sans aucun doute réfléchi - les inconvénients semblent être des aspects positifs. J'aime le fait que non seulement il existe des versions très bien faites du personnage, qui semblent assez définitives, mais je trouvais qu'il y avait plusieurs interprétations définitives du personnage. L'autre jour, je regardais le making-of de Batman & Robin. Et même à ce moment-là, Georges Clooney disait qu'il était préoccupé par le fait de refaire la même chose qu'un autre. Et c'était en 96, 97 ? 

Oui, 1997.
Et puis il y a la version de Christian Bale, de Ben Affleck. Et puis, je trouvais que c'était plus marrant quand d'autres étaient déjà passés avant. Genre, où est la différence ? Vous avez vu cette version plus légère, cette version désabusée, cette version plus animale. Et le casse-tête devient assez satisfaisant, de se dire : où est mon angle d'attaque ? Et puis, ai-je quelque chose en moi qui me permet de le faire ? Et puis aussi, c'est un rôle légendaire, non ? J'aime cela. Il y a si peu de films dans la vie où les gens se passionnent avant même qu'il n'ait lieu. Vous pouvez presque ressentir cette anticipation, et cela vous stimule. C'est différent quand vous faites un rôle et qu'il est possible que personne ne le voie. Pas vrai ? D'une certaine manière, je ne sais pas...cela pimente les choses. [Rires]

Allo ? Allo ? [Le téléphone se déconnecte. Pattinson rappelle.] Que s'est-il passé ?
Mon téléphone est mort. Qu'étiez-vous entrain de dire ?

Vous parliez de peur. Vous vous prépariez à dire quelque chose qui me passionnait par rapport à la terreur et Batman, mais maintenant j'ai perdu le fil.
Ma, euh, ma publiciste m'appelle toujours après une interview et elle me dit :"As-tu allumé des incendies ? Que dois-je réparer pour toi maintenant ?" et je me dis : "Je ne me souviens même pas ce que j'ai pu dire."

Quelques jours plus tard, Pattinson a décidé de cuisiner pour moi. Ou de cuisiner devant moi. Parler via Face Time, nous en avons convenu, était dur, épuisant. Nous en avions marre de nous regarder. Mais que peuvent faire deux hommes ensemble lorsqu'ils sont sur des continents différents, dans des fuseaux horaires différents ? Pattinson s'est dit : cuisiner. Il avait des notions de Top Clef, s'est dit que nous allions photographier nos réfrigérateurs respectifs et nous affronter. (Aucun de nous n'a vraiment vu Top Chef). Mais ensuite, il a regardé dans son réfrigérateur et "les ingrédients dedans sont tellement différents les uns des autres. Il n'y a aucun moyen de les assembler." Donc il est allé au magasin du coin, et maintenant, il est là, avec un plan.

J'aimerais pouvoir vous dire si ce que je vais décrire ici est une performance artistique, ou si c'est  sincère - encore maintenant, je ne sais pas vraiment. Je pense que certaines parties sont réelles et d'autres non. "Il n'est pas méchant," dit Claire Denis à propos de Pattinson. "Mais il essaye toujours de s'échapper. Il ne veut pas que vous vous agrippiez trop profondément. Parfois je l'oublie et je lui envoie un message un peu personnel. Et il me répond toujours : hahahaha. 'C'est la limite, Claire.' Vous voyez ?"

Je vois.

Quoi qu'il en soit, l'histoire que raconte Pattinson pour expliquer ce qu'il s'apprête à faire est à peu près la suivante :

L'année dernière, dit-il, il a eu une idée d'entreprise. Et si, se dit-il, "les pâtes avaient le même type de qualité que les hamburgers et les pizzas pour faire de la restauration rapide ? J'essayais de trouver comment capitaliser ce domaine sur le marché et je me suis dit : Comment faire des pâtes que vous pouvez tenir dans la main ?"

Il dit qu'il est allé jusqu'à concevoir un prototype qui impliquait l'utilisation d'un gril à panini, puis, dit-il, il est allé encore plus loin, en organisant une réunion avec le roi de la restauration à Los Angeles Lele Massimini, le cofondateur de Sugarfish et la propriétaire du restaurant de pâtes à Santa Monica, Uovo. "Et je lui ai expliqué mon idée," se rappelle Pattinson, "et son expression n'a même pas changé. Même après avoir eu connaissance de mon plan. Il n'avait aucune expression, littéralement. Et donc ça m'a un peu découragé." (Massimini dit : "C'est 100% vrai, tout ce qu'il vous a dit.")

Néanmoins, dit Pattinson, il a conçu un nom de marque pour son produit, un petit nom doux qui résume la création de pâtes selon lui : Piccolini Cuscino. Petit oreiller. Il s'est dit qu'il allait donner une autre chance à son produit avec moi : "Peut-être que si je le dis dans GQ, un partenaire viendra."

Donc, il sort du sac ce qu'il a acheté au magasin du coin, ce qui donne ceci :

Une (1) boite géante, sale et couverte de poussière de Cornflakes. ("Je suis allé au magasin et ils ne vendaient pas de chapelure. Je me suis dit : 'Oh merde ! Je vais juste prendre des cornflakes. C'est quasiment la même merde.'")

Un (1) briquet fantaisie incroyablement grand. ("J'ai toujours aimé l'idée de faire une petite flambée, comme le nom de la marque, avec des petits morceaux brûlés sur le dessus.")

Neuf (9) paquets de fromage en tranches. ("J'ai eu neuf paquets de fromage en tranches.")

De la sauce. (De la sauce tomate ? "N'importe quelle sauce.")

Il met des gants en latex. Il sort du sucre et du papier aluminium et fait un lit, une sorte de sphère évidée avec le papier aluminium. Il tient une boite de pâtes penne qu'il avait à la maison. "Très bien," dit Pattinson. "Donc évidemment, d'abord, tu dois faire cuire les pâtes au micro-ondes."

Je le regarde alors qu'il verse des pennes secs dans un bol de céréales, les recouvre d'eau et les place au micro-ondes pendant 8 minutes. Il dit qu'utiliser des pennes est un nouveau territoire pour lui. D'habitude, il utilise...eh bien... "Connaissez-vous les pâtes qui ressemblent un peu à une goutte, une goutte ondulée ?

"Gnocchi ?"

"Non, non, non, non, cela ressemble à - comment cela s'appelle ? Cela ressemble en quelque sorte à un chignon désordonné."

"Je ne sais pas du tout de quoi vous parlez," dis-je.

"Il y avait un type de pâtes qui marche. Ce n'est certainement pas des pennes."

Néanmoins, les pennes et l'eau sont au micro-ondes pour 8 minutes. En attendant, il prend l'aluminium et il commence à y déposer du sucre. "Après plusieurs expérimentations, j'ai découvert que vous devez vraiment tout figer dans une énorme quantité de sucre et de fromage." Donc après le sucre, il ouvre le premier paquet de fromage et commence à superposer les tranches sur le sucre. Puis plus de sucre : "Il faut vraiment une croûte de sucre."

Ensuite, il se rend compte qu'il a oublié la couche extérieure, qui est censée être de la chapelure, mais qui sera aujourd'hui des corn-flakes écrasés, il soulève donc le tas de fromage et de sucre et émiette quelques corn-flakes sur le papier aluminium, avant de replacer le sucre-fromage dessus. Ensuite, il ajoute de la sauce, qui est rouge. Le micro-ondes sonne et Pattinson se brûle avec le bol de pâtes. Il soupire, lourdement, en le regardant. "Je ne sais pas si c'est cuit ou pas." Il jette les pâtes dessus de toute façon. A ce stade, son esprit commence visiblement à fléchir. "Je veux dire, il n'y a aucune chance pour que cela marche. Absolument aucune."

Le petit oreiller est maintenant presque construit, il verse plus de sucre dessus et prend la moitié d'un pain, qu'il creuse et qu'il place au dessus du reste, quelque soit cette chose, et ... il commence à brûler le dessus avec le briquet fantaisie géant. "je vais juste faire les initiales..."

"On à l'impression que vous cuisinez de la méthamphétamine," dis-je, parce que c'est le cas.

"J'essaie vraiment de vendre cette entreprise. Je fais cela pour ma marque."

A ce stade, il enflamme accidentellement l'un de ses gants en latex, qui fond rapidement sur sa paume. Il crie de douleur. Puis il tient délicatement le produit fini : un P approximatif, suivi d'un C pour Piccolini Cuscino, brûlé sur le haut d'un pain à hamburger.

Il commence à envelopper le tout avec plus d'aluminium et le compacte, puis l'enveloppe un peu plus, puis presse de nouveau. Soudain, il s'arrête : "Pouvez-vous vraiment mettre du papier aluminium dans un four ?"

Je lui répond que oui, mais que vous ne devez absolument pas en mettre dans un micro-ondes. Et il répond, cool, cool, puis il part à la recherche du four, qu'il n'a encore jamais utilisé, et c'est une belle maison, donc il y a plusieurs options, et celle qu'il choisi, eh bien : cela ressemble plus à un micro-ondes pour moi. Il m'assure que ce n'est pas le cas.

"Je dirais, probablement... 10 minutes ?"

Il met la sphère en aluminium, le petit oreiller, dans ce qu'il pense être un four, alors que je pense que c'est un micro-ondes. Il essaie de l'allumer. "Je savais comment le faire avant," me dit-il. "Je l'ai fait hier. Et maintenant, c'est tout simplement impossible. On va avoir l'impression que je ne sais pas du tout cuisiner."

Il farfouille quelques boutons de plus. "Oh, oh, oh," dit-il avec enthousiasme. "Mille Watts, nous y voilà."

Fièrement, il revient vers le comptoir où se trouve son téléphone, lorsque, derrière lui, un éclair provient du four/micro-ondes, et Pattinson se baisse vivement comme si quelqu'un dehors avait allumé un feu. Il rigole et s'accroupit alors que le four émet des scintillements.

"L'électricité, putain... oh, mon dieu," dit-il toujours sur le sol. Et puis, avec un bruit final fort, le four/micro-ondes s'éteint.

Dans le silence, Pattinson et moi regardons tous les deux la mystérieuse machine construite dans le mur derrière lui.

"Ouais, je pense que je vais laisser ça tranquille," dit-il, soupirant à nouveau en se soulevant du sol. "Mais c'est un Piccolini Cuscino."

15 Avril, 10:35 a.m. PST // 6:35 p.m. GMT

Pattinson : A qui d'autres avez-vous parlé ? Avez-vous parlé à, hum, Claire Denis ou à d'autres personnes ?

GQ : oui, j'allais justement vous demandez qui d'autre je devrais appeler. Qui vous connaît bien ?
Hum, qui d'autres ? ... C'est toujours étrange, n'est-ce pas ? J'ai presque envie de le demander à des personnes qui ne m'aiment pas vraiment. 

Vous voulez que je parle à quelqu'un qui vous déteste ? Pouvez-vous me dire qui vous déteste ?
Ce serait vraiment drôle. [Rires] Ce serait vraiment drôle. Quelqu'un que je connais à peine. "Hé, pouvez-vous faire une interview à mon sujet ?" J'ai toujours trouvé que ce serait une bonne insulte. Vous l'envoyez simplement à l'agent d'un grand acteur pour lui dire, "Hé, je me demande, aimeriez-vous être son assistant ?" [Rires] Il n'y a pas de retour en arrière possible. 

Vous êtes un véritable agent du chaos.
Je ne le suis que dans ma tête. [Rires]

Enfin, nous en arrivons à parler, comme le font la plupart des gens aujourd'hui, d'anxiété. La phrase habituelle : Comment tenez-vous le coup ? Pattinson dit qu'il va bien. "Je suis bien plus calme qu'avant. Si cela c'était passé il y a quelques années, ce serait une toute autre histoire."

Il explique que dans sa vingtaine, pendant un temps, il ne ressentait que de la peur et de l'incertitude, mais d'une certaine manière, cela a changé. "Je crois que je vieillis, tout simplement. J'ai l'impression d'avoir moins de choses à prouver," dit-il. "Ou cela paraît plus amusant de le faire. Cela ressemble plus à un jeu amusant qu'à un cauchemar."

Il fait encore des choses qui paraissent étranges ou compulsives aux yeux des autres. Beaucoup de choses, en fait. Robert Eggers dit que Pattinson est presque comme "Andy Kaufman dans la vraie vie. Vous vous demandez 'Est-ce drôle ?', 'Je ne sais pas du tout ce qui se passe.'" Il a l'habitude de contacter les gens qu'il admire, encore et encore, mais il admet également librement que sa notion du temps est incertaine et que des malentendus malheureux peuvent se produire. "J'ai récemment envoyé un e-mail à ce type qui me terrifie," dit Pattinson. "Il a finalement transmis mon email à l'une des actrices de son film pour qu'elle me parle à sa place et que je ne lui envoie plus d'e-mail. Et je pensais qu'il s'était passé deux ans et demi entre chaque email, mais ils n'étaient qu'à quelques semaines d'intervalle."

Sa famille est à Londres, et "j'ai vraiment essayé d'aider ma famille à trouver un certain calme, je suppose. Je pense que j'ai probablement fini par trouver un nouveau niveau de patience en moi. C'est quelque chose de majeur. Hum, mais euh..."

"Est-ce normalement votre rôle dans votre famille, d'être source de calme ?" demandé-je.

Pattinson rit longtemps. "Euh...non. Je me suis désigné comme cela tout seul. Je me suis convaincu que je peux être un thérapeute familial."

"Y croient-ils ?"

"On ne sait jamais." dit-il en riant à nouveau. "Je crois que c'est le genre de situation où vous continuez à parler à quelqu'un jusqu'à ce qu'il soit épuisé. Ils n'ont plus d'énergie pour être énervé. C'est une thérapie d'usure."

"Cela semble être votre cadeau, n'est-ce pas ? Envoyer des mails aux gens encore et encore et ainsi de suite."

"Et dès que quelqu'un le fait remarquer, je me dis, 'Oh mon dieu !' ou je le nie." Et puis Pattinson semble être à court de rires. Il lève les yeux, puis les descend et soupire une dernière fois lourdement.

"Mais oui," dit-il. "Je crois que... je crois que tout le monde se dit que c'est une période assez bizarre."

 Source 

Un grand merci à @sallyvg pour cette super trouvaille !

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Ah, génial! Aussi bien que de vrai pros et son brin de folie que j'aime tant chez lui que l'on retrouve dans ses photos. Bon, on découvre un nouveau talent chez lui (lol)

sophie80 a dit…

Oui. C'est vrai... un petit brin de folie. Sympa !!!!
Par contre je mets un bémol pour les cheveux particulièrement dégueu....

Anonyme a dit…

Merci pour ta traduction et surtout ta rapidité. Cet interview est très lunaire, surtout au début.