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samedi 20 avril 2019

Nouvelle interview de Robert Pattinson et Claire Denis avec Collider


Traduction française :

Si il y a une chose sur laquelle vous pouvez toujours compter chez Claire Denis, c'est que nous ne savais jamais à quoi s'attendre avec ses films. La cinéaste qui est à l'origine des films les plus charnels et troublants du 21ème siècle comme Bastard et Trouble Every Day, s'est plus récemment tournée vers la romance avec sa superbe comédie Let The Sunshine In en 2017, et aujourd'hui, elle réalise l'un des mouvements les plus audacieux de sa brillante carrière avec High Life. 

High Life est le premier film de Denis entièrement en anglais, son premier film tourné en studio et sa première immersion dans la science-fiction, et si vous ne le saviez pas, son approche du genre ne ressemble en rien à ce que vous attendez d'un film de science-fiction conventionnel. Robert Pattinson - un artiste estimé, qui a prouvé qu'il était l'un des acteurs les plus audacieux de sa génération - joue le rôle de Monte, un condamné à mort flottant à travers l'espace vers un trou noir avec sa fille en bas âge. A partir de là, cela devient plus étrange. 

Pour Pattinson, de finalement travailler avec Denis est un rêve qui devient réalité. L'acteur est tombé amoureux de son travail après avoir vu White Material sorti en 2009 et a cherché à collaborer avec elle. A l'époque, Denis pensait qu'il était trop jeune pour le rôle de Monte, mais il a fallu tenir compte de certains retards de production et de la persuasion de Pattinson, et finalement, High Life a vu le jour. Et dieu merci. Le résultat est l'un des films les plus impressionnants et déroutants de leur carrière respective; un voyage hallucinant à travers l'espace qui puise dans le chagrin, l'espoir et le désespoir absolu d'être isolé en un seul coup spectaculaire. 

Maintenant que High Life est à l'affiche, j'ai récemment eu l'opportunité de m'asseoir avec Denis et Pattinson pour parler des séduisants mystères de leur film inexplicable. Le duo a parlé de ce qu'ils ont le plus apprécié en travaillant ensemble après toutes ces années d'attentes, pourquoi la narration non linéaire convenait-elle pour Monte, pourquoi le jardin et la fuckbox étaient essentielles et de la relation "dérangeante" entre Monte et sa fille. Denis a même brièvement parlé de ce que cette lumière jaune à la fin signifie pour elle. Découvrez ce qu'ils avaient à dire dans l'interview ci-dessous.

Je sais que vous avez beaucoup parlé du long cheminement qui vous a poussé à travailler ensemble, mais une fois que vous avez fini par tourner ensemble, qu'est-ce qui vous a le plus plu en tant que partenaires créatifs ?

Robert Pattinson : Je pense que c'était quelque chose qui a pris beaucoup de temps à se développer, mais lorsque vous y arrivez réellement... Je veux dire, nous nous connaissions assez bien. Je veux dire, cela a pris des années. Donc, je pense que cela a vraiment aidé. Quelque chose qui était, à bien des égards, un tournage assez organique. Parfois, cela peut-être extrêmement éprouvant pour les nerfs quand vous essayez de filmer des choses de façon naturelle, surtout lorsqu'un enfant est impliqué. Mais je savais déjà que ce serait amusant et je savais que vous pouviez faire quelque chose de fou et qu'on ne se moquerait pas. Et même si on se moquerait de moi, je ne le prendrais pas personnellement. [Rires]



Claire Denis : Pour moi, c'était formidable de pouvoir avoir Robert 2 semaines avant le début du tournage à Cologne, afin que nous puissions aller à l'Agence Spatiale Européenne, sans parler du film lui-même, simplement pour être ensemble avec Juliette et voir un vrai cosmonaute. Je me sentais mieux, le stress du premier jour de tournage était un peu mis de côté, vous savez ? Donc quand nous avons commencé à tourner, nous avons commencé avec le bébé et c'était...normal. Je ne peux même pas le décrire... nous devions attendre le bébé, qu'elle pleure, se nourrisse ou dorme. C'était une vie normale, vous savez ? Et j'ai un peu oublié le stress de la première semaine de tournage avec un acteur avec lequel je n'avais jamais travaillé avant. Pour moi, d'être dans un studio était presque une expérience, car la lumière n'était pas finie, ils n'avaient pas tout à fait terminé, nous étions toujours entrain de finir le jardin. 

Toutes ces petites choses m'aident à me concentrer sur le plus important, être avec Monte et le bébé et rien d'autre. Et le directeur de la photographie, parce que je pense que dans un film comme celui-ci, dans un espace aussi petit avec une lumière programmée. Si je n'avais pas eu un directeur de la photographie aussi gentil et cool, cela aurait été plus stressant. 

Qu'est-ce qui vous a attiré dans le fait d'utiliser une narration non linéaire comme la bonne approche pour aborder cette histoire, et celle de Monte en particulier ?

Denis : Pour moi, c'était très simple. A la minute où j'ai vraiment commencé à travailler sur le scénario de cette histoire, le seul début possible était dans le jardin, avec le bébé appelant son père et le père réparant ce truc dans le vide et lui parlant, et elle commence à pleurer et soudainement, vous remplissez le vide, c'est tout. Mais pour moi, c'était gravé dans ma mémoire et je devais prendre en considération l'équipage; tous ces gens qui sont morts pour arriver à la deuxième partie. Je ne pouvais pas complètement raconter cette aventure de façon chronologique. Je voulais que cela fasse partie de la mémoire de Monte et rien d'autre. 

Vous m'avez parfaitement piégé, car je suis fasciné par la façon dont les cinéastes s'imposent pour ouvrir et fermer le cadre, et vous avez déjà répondu à la première question, donc comment en arrivez-vous à cette lumière jaune comme étant le cadre idéal pour clôturer le voyage de Monte ?

Denis : Eh bien, je n'ai jamais envisagé d'autres manières. Lors de mes recherches préliminaires j'ai trouvé la lumière jaune inventée par Olufar [Eliasson] et cette lumière jaune représentait la fin pour moi. Comme un instant de singularité, mais il n'y avait pas d'autres fin pour moi. Jamais. Pour moi, il y a de l'espoir dans cette fin. Ce n'est pas une fin triste. "On y va ? Oui." Je ne veux pas parler à votre place. Mais le début et la fin, je veux dire que si vous ne vous attachez pas à certaines choses, physiquement, comme le fait d'écrire un scénario, certains thèmes. C'est comme la fuckbox, par exemple, c'est quelque chose que je savais, et le jardin, de manger la fraise, des choses comme ça, mais elles ne sont pas solides. Vous pouvez faire un film de cette façon, vous savez ? Cela n'a pas de valeur à filmer. 

Je sais que vous vouliez vraiment travailler avec elle, mais quand vous avez enfin eu le scénario, vous savez, elle parle du jardin et de la fuckbox, ces choses qui se sont vraiment distinguées dans l'histoire, mais comment était-ce quand vous avez lu le scénario, quels sont les images ou les moments qui vous ont le plus excité ?

Pattinson : Il y a quelque chose de très étrange... Les gens parlent toujours de tabous et vous avez un gars qui a été en prison ou isolé toute sa vie et soudainement, il est seul avec cette fille. Il y avait un sentiment assez étrange, un présage inquiétant et on avait l'impression qu'il y avait une menace étrange, sans pouvoir dire en quoi elle consistait. J'aime toujours jouer cela, il y a quelque chose à propos d'une caractéristique ou d'une situation et vous ne savez pas si le public va voir quelque chose de gentil ou... vous ne savez pas dans quel monde vous vous trouvez, ni si vous êtes complice d'aimer un personnage qui est sur le point de faire quelque chose de mal. 

Je veux dire, littéralement, quelqu'un m'a envoyé un message hier disant, "Oui, je vais aller voir High Life demain soir." puis, "Dis-moi que rien de mal ne va arriver au bébé." Ils ont littéralement dit :"Je ne sais pas si je suis capable de le regarder si quelque chose de mauvais arrive au bébé". Mais je n'aime vraiment pas dire cela et j'ai dit [prend une voix diabolique], "Je ne vais pas te le dire. Peut-être !" Je ne sais pas, il y a quelque chose à ce sujet. J'aime vraiment cette idée. Et puis, il y a tellement de choses différentes que les films de science-fiction, en général, sont si éloignés de la matière organique. Il y a quelque chose dans le fait de tourner un film qui parle tellement de fluides corporels et autres. Et même le jardin. Il y avait juste quelque chose de si étrange. Il y avait un énorme symbole dans l'histoire qui disait que ce jardin était très complet, comme de faire pousser du chou dans le vaisseau spatial, ce n'était pas particulièrement expliqué, cela avait l'air très juste dans l'écrit. 

Denis : Et je pense que tout le monde comprend à la fin. Pourquoi un jardin est si important quand vous êtes si loin de la Terre et qu'il n'y a pas de retour, vous savez ? Pour moi, le jardin a toujours été une obligation. Je ne sais pas pourquoi. Maintenant, je continue de dire que c'est à cause d'Andrei Tarkovsky. mais dans un sens, j'aime aussi jardiner, vous savez, je me suis dit que s'il y avait un jardin, alors le film irait bien. 

Je ne ferai jamais de mal à un bébé, jamais. 

J'aime ce que vous avez dit sur le fait de ne pas connaître le ton de ce que vous regardez, car durant une grande partie du film, je me suis dit, "Cela me fait me sentir bizarre et je ne sais pas si cela veut dire que je suis à l'ouest ou que c'est ce que le film fait."

Denis : C'est dérangé. [Rires]. 

Je me sentais légitime à la fin, mais j'aime bien un film qui vous incite à vous faire votre propre idée. 

Pattinson : Je suis fasciné de voir que peu de gens disent qu'ils ont une relation assez étrange. Parce que j'essayais de lui donner un air étrange. [rires]

Denis : Tu l'as fait, tu l'as fait. 

Pattinson : C'est comme s'il perdait le contrôle quand elle vieillit. C'est différent. 

J'ai certainement compris l'étrangeté. 

Denis : Il y avait une scène dans le scénario, peut-être plus lourde mais pas aussi bien. Les personnages de Mia Goth et Monte, sont en quelque sorte attirés l'un par l'autre, vous savez et cela ne se produit que très brièvement quand elle touche ta main, que tu la bats et durant la chanson. C'était une surprise même pour moi, car je savais que quelque chose manquait et nous avons trouvé cette belle chanson, c'était suffisant je pense. 

Pattinson : J'aime ça quand vous avez des gens qui... ils vivent dans un vaisseau spatial. Ce sont des enfants qui sont en prison et qui vivent dans un vaisseau spatial [Rires]. Ce n'est pas quelqu'un que vous venez de rencontrer par hasard. Leur comportement, je l'ai toujours trouvé assez intéressant, ce sont presque des animaux dans la façon dont ils se comportent ensemble et c'est très impulsif. Surtout avec le personnage de Mia, qui donne le ton. 

Des animaux en captivité également. Donc, je suis curieux, car vous avez travaillé sur cette question durant un moment, non ?

Denis : Bien sûr. 

Et puis vous avez vu l'exposition d'art Contact et vous avez réalisé votre court métrage, qui a influencé le fin du film. Était-ce plus tard, après que vous ayez développé cela durant un moment ?

Denis : C'est parce que je le savais. Je suis allée rendre visite à Olafur à Berlin, car je voulais cette ligne. Il préparait une exposition et il a dit, "Ok, mais ensuite faites un petit film pour moi." Et j'y suis allée et nous avons tourné cette lumière jaune et nous avons fait ce petit film 'Contact' pour Olafur. 

Pattinson : Est-ce que c'est sorti avant la sortie du film ?

Denis : The Contact ? Oui. 

Pattinson : Oh, je ne savais même pas que c'était disponible pour tous. 

Denis : Je l'ai donné à Olafur et il l'a utilisé comme une petite chose, tu sais ? 

Pattinson : Oh, dingue. Je n'en avais aucune idée. 

Comment avez-vous réagit l'autre jour quand ils ont publié cette première photo d'un trou noir et qu'elle était assez ressemblante à celle de votre film ?

[Ils se montrent l'un l'autre]

Denis : Nous nous sommes envoyés un message !

Pattinson : C'était exactement pareil. [Rires] C'est tellement bizarre. C'est l'une des choses les plus étranges. 

Denis : A ce moment là, à ce moment-là. Vraiment, vous savez ? C'est cool. 

Pattinson : Exactement la même couleur. 

C'est dingue. Félicitations, je suppose. Vous avez bien prédit la science. 

Denis : Des choses arrivent quand vous faites un film. Vous ne savez pas pourquoi. Je ne sais pas. 

Pattinson : J'ai vu un commentaire très drôle à ce sujet. C'était un tweet qui disait, "Cette photo contient suffisamment de données, cela équivaudrait à une vie entière de selfie de 40 000 personnes." Mais c'est comme cela que nous voyons les choses maintenant. 

Comment avez-vous choisi d'opérer sur le tournage, colliez-vous rigoureusement au scénario ou étiez-vous un peu plus libre, surtout quand un enfant en bas âge est impliqué ?

Pattinson : Ça faisait beaucoup. La chose bien c'était qu'une grande partie des scènes avec le bébé n'était qu'une ligne disant, elle fait pipi ou quelque chose d'autres et vous êtes entrain-

Denis : De manger des légumes dans le jardin, vous savez ?

Pattinson : Je cherchais où elle allait aller. Elle proposait toujours de meilleurs trucs que ce que j'allais essayer de lui faire faire. Si vous la laissiez seule une seconde, elle commençait à toucher des objets. Et elle ne pouvait pas marcher, donc elle restait au moins sur place. 

Denis : Elle a appris à marcher sur le tournage. Mais vous savez, le truc c'est que, je l'ai conçu de manière à montrer leur rituel quotidien. Il revient du travail. Il va au jardin, fait de la soupe. J'ai vu ce petit rituel d'un père et d'un enfant et quand elle est au lit et qu'elle dort, soudainement il est seul, cela suscite plus d'anxiété. Mais je trouve que le rituel a également aidé dans le film et nous a aidé avec le bébé. Nous faisions des choses normales, faire pipi, manger de la soupe, dormir. 

Pattinson : Je viens juste de me rendre compte qu'il y a quelque chose de très utile si vous marchez dans un décor avec un bébé et que vous essayez de leur faire remarquer des choses, tout à coup vous les remarquez également. 

Denis : Quand elle tape sur l'installation. 

Pattinson : Et instinctivement avec un bébé vous vous dites, "Regarde ci, regarde ça." Et en disant cela, vous vous concentrez, vous vous éloignés de vous-même également. C'est comme d'avoir un bon petit avatar avec vous. Comme un perroquet. 

Denis : Pour nous aussi, et pour l'équipe, c'était aussi une façon d'entrer dans le vaisseau sans l'équipe, sans bla bla. Une manière simple. 

Avant que je ne manque de temps. Robert, vous allez bientôt travailler avec Christopher Nolan et je sais que vous ne pouvez rien dire sur le film en lui-même, mais en tant qu'acteur qui a choisi des films très différents des blockbusters pour l'essentiel de votre carrière, trouvez-vous votre préparation différente de ce que vous avez fait durant la dernière décennie ?

Pattinson  J'y pensais justement hier. Je suis allé voir certains trucs pour me préparer et j'étais également inquiet de faire un gros film. Je veux dire, définitivement à ce stade, cela paraît toujours assez semblable car vous voyez en quelque sorte... c'est juste des dessins, des photos et autres. Mais j'étais stupéfait de voir à quel point Chris est déjà assez ouvert. Il y a des choses qui donnent l'impression d'être déjà très chorégraphiées, mais il est plutôt souple sur pas mal de choses. 

C'est intéressant, ce n'est pas ce que vous pensez quand vous pensez au processus de Nolan. 

Pattinson : Ce n'est pas du tout ce que les gens m'ont dit. Je l'ai entendu parlé à certaines personnes avant que je ne commence à travailler avec lui et vous devriez voir leurs cerveaux, il leur explique des choses et ils se disent, "Je ne sais pas de quoi vous parlez." Mais je pense que cela va être amusant. 

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