Traduction française :
New York (AP) - Claire Denis guidait Robert Pattinson à travers un trou noir.
Les deux étaient dans un studio à Cologne, en Allemagne, tournant une scène pour la curiosité spatiale de Denis "High Life," tandis que la vénérable cinéaste française criait des descriptions ("Maintenant divises toi comme une crêpe!") de la distorsion temporelle que le personnage de Pattinson était peut-être entrain de voir. Pattinson avait du mal à suivre.
"Je pleurais littéralement de rire. Tout le monde était très sérieux et j'avais les larmes aux yeux," se rappelle Pattinson. "Se diviser comme une crêpe ? je me disais, 'Mais de quoi parles-tu ?"
"Je me souviens de 'l'effet spaghetti,'" ajoute Denis avec un sourire. "L'effet spaghetti, se produit avant l'effet Pancake."
Aussi disposé que Pattinson a être étiré et déformé par les réalisateurs les plus aventureux dans des films, "High Life" - une énigme cosmique impulsée par les fluides corporels et la solitude infinie - est une nouvelle frontière pour lui. On pourrait en dire autant de Denis, la réalisatrice énigmatique et respectée de "Chocolat" et "Beau Travail" qui fait ses débuts en anglais dans "High Life".
Ensemble, ils forment un duo fascinant et curieux qui, malgré leurs origines éloignées semble vibrer sur la même fréquence.
"Je suis paresseuse. J'adore rester au lit tout le temps, lire, nager, ne rien faire. Et pourtant, faire des films est la meilleure chose qui me soit arrivée dans ma vie, avec l'amour et le sexe," dit Denis. "Faire des films a quelque chose de spécial, en particulier pour une personne très paresseuse. Si j'étais une personne très performante, très active, je ne prendrais pas de plaisir à faire des films. Les films sont fait pour les gens qui ne veulent rien faire."
Pattinon, assis aux côtés de la réalisatrice dans les bureaux de Manhattan du distributeur du film, A24, rit avec joie. "J'aime ça," plaisante-t-il. "Non, je suis d'accord. Je ne pourrais pas être plus d'accord."
Pourtant, il a fallu beaucoup d'efforts pour les réunir. Pattinson a d'abord cherché à rencontrer Denis après avoir vu "White Material," son film de 2009 sur une plantation de café dans un pays africain sans nom déchiré par la guerre et le colonialisme. Ce n'est que plusieurs années plus tard que Pattinson a obtenu un face à face, à Los Angeles.
"Mes agents ne voyaient pas vraiment l'importance que cela avait pour moi. Donc, quand la rencontre s'est terminée j'étais genre, "Quooooi ?" dit Pattinson, se tournant vers Denis. "Tu aurais pu être une totale (juron) et j'aurais quand même voulu faire le travail."
"Je suis une totale (juron), à propos," répond Denis. "J'étais impressionnée de voir comment c'était simple de le rencontrer. A quel point il était agréable. Maintenant, je ne peux imaginer quelqu'un d'autres que Robert pour Monte. Soudainement, le film a changé. C'est tout."
Lorsque Denis a fini le scénario de "High Life" avec Jean-Pol Fargeau, le rôle principal était un homme dans la cinquantaine. "High Life" parle d'un vaisseau spatial, volant loin du système solaire, peuplé par un groupe de condamnés arrachés au couloir de la mort. Ce sont les cobayes d'une expérience sur les trous noirs, menée par le Dr Dibs (une Juliette Binoche aux longs cheveux), qui les utilise en réalité pour essayer d'incuber un bébé.
"High Life" ne sera pas fait avant plusieurs années après leur première rencontre, une période au cours de laquelle Denis a réalisé "Let The Sunshine In", avec Juliette Binoche, et Pattinson a poursuivi sa série de films indépendants ("The Lost City of Z", "Good Time", "Damsel"), qui a commencé avec Cosmopolis de David Cronenberg. Pour l'acteur, cela a été une plongée artistique surprenante, qui a sûrement ébloui l'esprit de nombreux de fans de "Twilight".
Comme ces films, Pattinson a sauté dans "High Life" uniquement sur sa foi en la réalisatrice.
"Je me souviens d'avoir lu le le texte pour la première fois et de n'avoir aucun indice. C'est tellement agréable de s'engager dans quelque chose en sachant que vous êtes un vaisseau vide au départ," dit Pattinson. "Quand j'étais plus jeune, je commençais quelque chose en pensant que chaque scène avait besoin d'être préparée".
Pattinson, 32 ans, a tendance à susciter le sourire de Denis, 72 ans, quand il parle de sa jeunesse comme d'un passé lointain. Après que l'acteur ait dit qu'il était heureux que cela ait pris des années à faire "High Life" - "J'étais assez jeune quand nous nous sommes rencontrés la première fois. Je crois que j'avais 28 ans" - Denis répond : "Oui, tu es si vieux maintenant."
"Je pense que j'ai réellement grandi," dit Pattinson. "Quand j'ai vu le film, c'est une des premières fois où je me suis dit, "Oh, on dirait un adulte.""
Si ce n'était pas déjà tout à fait clair, "High Life" n'est pas votre film typique de science-fiction. Denis ne le considère même pas comme tel.
"Un grand nombre de films de science-fiction parlent de la conquête. Dans ce vide, cet immense univers, il n'y a pas beaucoup de choses à combattre, sauf si vous faites "Star Wars" et qu'un extraterrestre y habite. Mais bien sûr, ce n'était pas l'objectif," dit Denis. "Même si j'aime ces histoires, je n'aurais pas été capable de le faire pour plusieurs raisons. Mon imagination, peut-être, et le budget bien sûr."
"High Life", qui s'étend nationalement ce vendredi, parle plutôt de tout ce qui a traversé l'oeuvre de Denis : la violence, le sexe, le colonialisme, l'isolement, l'impuissance.
"Je n'ai pas d'idées abstraites," dit Denis. "Je ne sais pas ce que je fais. J'essaie de faire de mon mieux. Pour moi, j'essaie de faire des films sans concept. Honnêtement."
Denis conçoit plutôt le cinéma instinctivement et physiquement. Les corps et les mouvements sont essentiels, comme dans les exercices dans le désert des soldats torses nus de la Légion étrangère dans "Beau Travail".
"Je me souviens que quand j'étais enfant, la première fois que j'ai vu un Western avec John Wayne, je n'avais jamais vu un homme se comporter de la sorte avec ses hanches. Je me suis dit :"Waouh, c'est quelque chose,"" raconte Denis.
"Je ne vois pas que le visage. Je vois une personne complète, vous savez ?" poursuit-elle. "Si vous pensez à des films muets, ou à des Western ou à un film de Murnau, surtout "Tabou", c'est tellement physique. Un film qui n'a que des visages parlants, pour moi, c'est un peu comme la télévision. Ces acteurs de films muets étaient de grands danseurs. Je pense que cela colle bien avec un film".
Chercher ce genre de jeu holistique faisait partie de ce qui a attiré Pattinson vers Denis.
"Mon principal objectif dans n'importe quelle performance c'est d'essayer de lutter contre la conscience de soi," dit-il. "C'est tellement lié à l'utilisation du corps entier. J'avais aussi un peu peur de le faire, et je ne savais pas vraiment comment utiliser mon propre corps. Un grand nombre des films que j'ai déjà réalisé sont assez immobiles."
Peut-être que ce que Denis et Pattinson ont le plus en commun, c'est le désir de ne pas être contraint par des contextes prescrits : genres, attitudes, attentes. Denis, qui envisage de retrouver Pattinson pour une adaptation de "The Stars at Noon" de Denis Johnson, dit qu'elle s'intéresse de moins en moins à la cohésion d'un film, mais plus à la capture des moments inattendus, libres et détachés.
"C'est quelque chose que je ressens de plus en plus," dit Denis pendant que Pattinson hoche la tête. "C'est génial pour moi et l'équipe. C'est génial pour le jeu d'acteur. Nous sommes ensemble sur le moment. Nous vivons le même moment. Sinon, nous sommes là à vérifier le scénario et les acteurs sont seuls, portant leur scénario sur le dos. Ce n'est pas amusant."
Prenons, par exemple, un de ces moments dans High Life, où le bébé dans le film, Scarlett Lindsey, fait ses premiers pas.
"Pour que cela se produise dans un film !" s'exclame Pattinson alors que Denis soupire avec appréciation. "J'ai dit, 'Viens ici, viens ici," et le bébé a littéralement fait ses premiers pas. C'était tellement incroyable. Vous pouviez même voir l'expression sur son visage."
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Les deux étaient dans un studio à Cologne, en Allemagne, tournant une scène pour la curiosité spatiale de Denis "High Life," tandis que la vénérable cinéaste française criait des descriptions ("Maintenant divises toi comme une crêpe!") de la distorsion temporelle que le personnage de Pattinson était peut-être entrain de voir. Pattinson avait du mal à suivre.
"Je pleurais littéralement de rire. Tout le monde était très sérieux et j'avais les larmes aux yeux," se rappelle Pattinson. "Se diviser comme une crêpe ? je me disais, 'Mais de quoi parles-tu ?"
"Je me souviens de 'l'effet spaghetti,'" ajoute Denis avec un sourire. "L'effet spaghetti, se produit avant l'effet Pancake."
Aussi disposé que Pattinson a être étiré et déformé par les réalisateurs les plus aventureux dans des films, "High Life" - une énigme cosmique impulsée par les fluides corporels et la solitude infinie - est une nouvelle frontière pour lui. On pourrait en dire autant de Denis, la réalisatrice énigmatique et respectée de "Chocolat" et "Beau Travail" qui fait ses débuts en anglais dans "High Life".
Ensemble, ils forment un duo fascinant et curieux qui, malgré leurs origines éloignées semble vibrer sur la même fréquence.
"Je suis paresseuse. J'adore rester au lit tout le temps, lire, nager, ne rien faire. Et pourtant, faire des films est la meilleure chose qui me soit arrivée dans ma vie, avec l'amour et le sexe," dit Denis. "Faire des films a quelque chose de spécial, en particulier pour une personne très paresseuse. Si j'étais une personne très performante, très active, je ne prendrais pas de plaisir à faire des films. Les films sont fait pour les gens qui ne veulent rien faire."
Pattinon, assis aux côtés de la réalisatrice dans les bureaux de Manhattan du distributeur du film, A24, rit avec joie. "J'aime ça," plaisante-t-il. "Non, je suis d'accord. Je ne pourrais pas être plus d'accord."
Pourtant, il a fallu beaucoup d'efforts pour les réunir. Pattinson a d'abord cherché à rencontrer Denis après avoir vu "White Material," son film de 2009 sur une plantation de café dans un pays africain sans nom déchiré par la guerre et le colonialisme. Ce n'est que plusieurs années plus tard que Pattinson a obtenu un face à face, à Los Angeles.
"Mes agents ne voyaient pas vraiment l'importance que cela avait pour moi. Donc, quand la rencontre s'est terminée j'étais genre, "Quooooi ?" dit Pattinson, se tournant vers Denis. "Tu aurais pu être une totale (juron) et j'aurais quand même voulu faire le travail."
"Je suis une totale (juron), à propos," répond Denis. "J'étais impressionnée de voir comment c'était simple de le rencontrer. A quel point il était agréable. Maintenant, je ne peux imaginer quelqu'un d'autres que Robert pour Monte. Soudainement, le film a changé. C'est tout."
Lorsque Denis a fini le scénario de "High Life" avec Jean-Pol Fargeau, le rôle principal était un homme dans la cinquantaine. "High Life" parle d'un vaisseau spatial, volant loin du système solaire, peuplé par un groupe de condamnés arrachés au couloir de la mort. Ce sont les cobayes d'une expérience sur les trous noirs, menée par le Dr Dibs (une Juliette Binoche aux longs cheveux), qui les utilise en réalité pour essayer d'incuber un bébé.
"High Life" ne sera pas fait avant plusieurs années après leur première rencontre, une période au cours de laquelle Denis a réalisé "Let The Sunshine In", avec Juliette Binoche, et Pattinson a poursuivi sa série de films indépendants ("The Lost City of Z", "Good Time", "Damsel"), qui a commencé avec Cosmopolis de David Cronenberg. Pour l'acteur, cela a été une plongée artistique surprenante, qui a sûrement ébloui l'esprit de nombreux de fans de "Twilight".
Comme ces films, Pattinson a sauté dans "High Life" uniquement sur sa foi en la réalisatrice.
"Je me souviens d'avoir lu le le texte pour la première fois et de n'avoir aucun indice. C'est tellement agréable de s'engager dans quelque chose en sachant que vous êtes un vaisseau vide au départ," dit Pattinson. "Quand j'étais plus jeune, je commençais quelque chose en pensant que chaque scène avait besoin d'être préparée".
Pattinson, 32 ans, a tendance à susciter le sourire de Denis, 72 ans, quand il parle de sa jeunesse comme d'un passé lointain. Après que l'acteur ait dit qu'il était heureux que cela ait pris des années à faire "High Life" - "J'étais assez jeune quand nous nous sommes rencontrés la première fois. Je crois que j'avais 28 ans" - Denis répond : "Oui, tu es si vieux maintenant."
"Je pense que j'ai réellement grandi," dit Pattinson. "Quand j'ai vu le film, c'est une des premières fois où je me suis dit, "Oh, on dirait un adulte.""
Si ce n'était pas déjà tout à fait clair, "High Life" n'est pas votre film typique de science-fiction. Denis ne le considère même pas comme tel.
"Un grand nombre de films de science-fiction parlent de la conquête. Dans ce vide, cet immense univers, il n'y a pas beaucoup de choses à combattre, sauf si vous faites "Star Wars" et qu'un extraterrestre y habite. Mais bien sûr, ce n'était pas l'objectif," dit Denis. "Même si j'aime ces histoires, je n'aurais pas été capable de le faire pour plusieurs raisons. Mon imagination, peut-être, et le budget bien sûr."
"High Life", qui s'étend nationalement ce vendredi, parle plutôt de tout ce qui a traversé l'oeuvre de Denis : la violence, le sexe, le colonialisme, l'isolement, l'impuissance.
"Je n'ai pas d'idées abstraites," dit Denis. "Je ne sais pas ce que je fais. J'essaie de faire de mon mieux. Pour moi, j'essaie de faire des films sans concept. Honnêtement."
Denis conçoit plutôt le cinéma instinctivement et physiquement. Les corps et les mouvements sont essentiels, comme dans les exercices dans le désert des soldats torses nus de la Légion étrangère dans "Beau Travail".
"Je me souviens que quand j'étais enfant, la première fois que j'ai vu un Western avec John Wayne, je n'avais jamais vu un homme se comporter de la sorte avec ses hanches. Je me suis dit :"Waouh, c'est quelque chose,"" raconte Denis.
"Je ne vois pas que le visage. Je vois une personne complète, vous savez ?" poursuit-elle. "Si vous pensez à des films muets, ou à des Western ou à un film de Murnau, surtout "Tabou", c'est tellement physique. Un film qui n'a que des visages parlants, pour moi, c'est un peu comme la télévision. Ces acteurs de films muets étaient de grands danseurs. Je pense que cela colle bien avec un film".
Chercher ce genre de jeu holistique faisait partie de ce qui a attiré Pattinson vers Denis.
"Mon principal objectif dans n'importe quelle performance c'est d'essayer de lutter contre la conscience de soi," dit-il. "C'est tellement lié à l'utilisation du corps entier. J'avais aussi un peu peur de le faire, et je ne savais pas vraiment comment utiliser mon propre corps. Un grand nombre des films que j'ai déjà réalisé sont assez immobiles."
Peut-être que ce que Denis et Pattinson ont le plus en commun, c'est le désir de ne pas être contraint par des contextes prescrits : genres, attitudes, attentes. Denis, qui envisage de retrouver Pattinson pour une adaptation de "The Stars at Noon" de Denis Johnson, dit qu'elle s'intéresse de moins en moins à la cohésion d'un film, mais plus à la capture des moments inattendus, libres et détachés.
"C'est quelque chose que je ressens de plus en plus," dit Denis pendant que Pattinson hoche la tête. "C'est génial pour moi et l'équipe. C'est génial pour le jeu d'acteur. Nous sommes ensemble sur le moment. Nous vivons le même moment. Sinon, nous sommes là à vérifier le scénario et les acteurs sont seuls, portant leur scénario sur le dos. Ce n'est pas amusant."
Prenons, par exemple, un de ces moments dans High Life, où le bébé dans le film, Scarlett Lindsey, fait ses premiers pas.
"Pour que cela se produise dans un film !" s'exclame Pattinson alors que Denis soupire avec appréciation. "J'ai dit, 'Viens ici, viens ici," et le bébé a littéralement fait ses premiers pas. C'était tellement incroyable. Vous pouviez même voir l'expression sur son visage."
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