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Le golden boy d'Hollywood, Robert Pattinson est un choix parfait pour le nouveau biopic sur James Dean - sauf qu'il ne joue pas le rôle-titre. Il raconte à Tim Lewis pourquoi il s'inquiète au sujet de ses capacités d'acteurs et a été embarrassé à la gym.
"Qui serait une icône ?"
C'est un de ces 4 jours d'été parfait, un vendredi après-midi pour commencer et les londoniens les plus suffisants sortent du travail, il ressemblent à des zombies bronzés et à la mode et se rendent au club privé Shoreditch House. Pendant ce temps, dans une petite pièce sans joie, exposée au nord, qu'on appelle la bibliothèque, vous trouverez Robert Pattinson, l'acteur britannique de 29 ans. Il n'est pas bronzé, il est bien connu pour avoir été le pâle suceur de sang éternellement jeune. Il n'a pas un air suffisant non plus ; en fait ce serait difficile de trouver une personne moins contente de soi. Et il est venu au Shoreditch House aujourd'hui pour travailler - pour faire des interviews en tout cas, un des éléments les moins agréables de son travail et il n'est pas convaincu d'être particulièrement bon pour ça.
Pattinson vient-il souvent ici ? "Euh, ouais, en quelque sorte," se décide-t-il finalement. "J'avais l'habitude d'aller à la gym ici jusqu'à ce que je réalise que je ne voulais pas que les gens me voient aller à la gym. " Rit-il, d'un gros rire, chic et inattendu. "J'étais tellement gêné," poursuit-il. "Quand vous essayez de soulever des haltères de 10 livres... la nouvelle se répand."
Pattinson est monochromatique aujourd'hui : T-Shirt blanc et veste légère, jean noir, bottes et casquette de baseball sans marque. Il a une grosse barbe (nos photos ont été prises avant qu'il ne la laisse pousser). C'est le genre de barbe de l'époque victorienne, avec une moustache complexe, pour un rôle qu'il est en train de tourner, "Oh, ça me rend dingue," dit-il. "Faites-le moi savoir si j'ai quelque chose de coincer dedans. L'avocat est particulièrement mauvais." Pattinson se frotte le menton : " Hmm, oui, l'avocat n'est pas l'ami des barbus."
C'est à ce moment-là, pendant ces quelques minutes, que je réalise que je vais apprécier Pattinson. Ce n'est pas quelque chose qu'il a dit en particulier, mais c'est, faute de meilleurs mots, ce qu'il dégage. Si quelqu'un doit être pardonné d'être excentrique, c'est lui. Les chances de Pattinson d'avoir une carrière normale - une vie normale - ont disparu quand il est apparu, à l'âge de 22 ans, dans le rôle du vampire Edward Cullen dans Twilight en 2008. Plus de 5 films avec lesquels il est devenu très riche, désagréablement célèbre et très convoité. Un exemple : l'an dernier à Las Vegas, une femme a épousé un carton grandeur nature à l'effigie de Pattinson, pour leur lune de miel elle l'a porté jusqu'au panneau Hollywood.
Une telle attention, une telle dévotion non désirée, bousculerait n'importe qui. Mais ce qui est attachant à propos de Pattinson c'est que c'est facile de voir le genre de personne qu'il était avant de devenir un des acteurs les plus connus au monde. C'est un peu un gaffeur. Il est enclin à jacasser sur, disons, le fait d'avoir un morceau d'avocat sur le visage.
En bref, Pattinson ne se considère pas comme un don de Dieu. Il reste un homme d'une vingtaine d'années venant de la banlieue de Londres dont le père vendait des voitures vintage et dont la mère était agent de mannequin.
Le plus intéressant à propos de Pattinson ces jours-ci, c'est la carrière vers laquelle il se dirige. Pour simplifier, presque tous les réalisateurs veulent Pattinson dans leur film : il a un nom qui permet au projet d'avoir le feu vert et des fans ce qui veut dire des gens qui sont sûrs de le voir. Pourtant, il a choisi de se servir de son pouvoir d'une manière non conventionnelle. Parfois il cherche activement des cinéastes qu'il admire : "Il y en a beaucoup et j'aime des choses très spécifiques." Il ne demande pas le plus gros rôle ou son nom écrit en grand sur l'affiche du film - même si c'est ce qui arrive en général. Il a travaillé deux fois avec l'auteur culte David Cronenberg (Cosmopolis et Maps To the Stars) et avec Werner Herzog, dans le rôle de T.E Lawrence dans le prochain biopic sur Gertude Bell, Queen of the desert, aux côtés de Nicole Kidman et James Franco. Il vient juste de signer pour jouer un astronaute dans le premier scénario de Zadie Smith.
Et ce mois-ci, Pattinson joue dans Life, d'Anton Corbijn, un film chaleureux, perspicace sur James Dean. Mais Pattinson ne joue pas Dean, il est Dennis Stock, un photographe de l'agence Magnum qui se lie d'amitié avec l'acteur en 1955 et prend la photo emblématique de lui marchant dans Times Square, fumant, recroquevillé sous la pluie. Pattinson insiste qu'il n'a jamais, même pas pendant 1 seconde, envisagé faire le rôle de Dean, rôle joué par Dane DeHaan.
"Je n'aurais pas su par où commencer," dit Pattinson. "Je suppose que les gens y pensent à cause de Twilgiht, car les gens parlaient toujours du côté "rêveur". Je ne sais pas vraiment ce que ce mot veut dire, à part le fait que c'est une poule qui est assise sur ses œufs [Ndlt : en anglais brooding veut également dire couvaison]. Donc je ne suis pas totalement sûr que cela soit considéré comme un trait attrayant."
Il y a cependant, des parallèles intriguant entre Dean et Pattinson, deux des stars emblématiques de leur époque, ou tout du moins un examen sur la manière dont la célébrité a changé en 60 ans entre leur point de vue respectif.
Life, Dean est à l'aube de la célébrité, juste avant la sortie de son premier film, A l'Est d'Eden (dans les 8 mois à venir il tournera 2 autres films, dont La Fureur de Vivre, avant de mourir dans un accident de voiture à l'âge de 24 ans.) Le studio, Warner Bros, lui fait faire des interviews et Dean les foire, en partie à cause de son inexpérience et en partie pour les saboter.
Pattinson connait certainement ce sentiment. "Quand le premier Twilight est sorti, je disais des choses débiles juste pour ne pas avoir l'air de faire partie des standards," se rappelle-t-il.
En général c'était assez ennuyeux, comme le fait d'admettre avoir pris un Xanax avant son audition finale pour se calmer, ou de dire qu'il a été saoule durant une année avant d'avoir le rôle, vivant comme un "petit ex-drogué cool" avec son meilleur ami, l'acteur Tom Sturridge. "Ce n'est pas très difficile de choquer les gens quand vous ne faites que jurer," dit Pattinson en rigolant. "Vous parlez du fait d'avoir la gueule de bois et vous voyez les attachés de presse agitant leur bras en disant 'Tais toi ! Tais toi !'"
D'une autre manière cependant, Life montre clairement comment la relation entre les célébrités et les médias a changé. Stock , avec les encouragements de Dean, suit l'acteur chez lui dans l'Indiana, dans la ferme où il a grandi avec son oncle et sa tante, dans une famille de Quaker. L'intimité de leurs échanges - et les photos qui ont créé cette relation - serait inimaginable aujourd'hui.
Pattinson le reconnaît. "L'idée de parler à un photographe dans la maison de ma famille... C'est dingue !" dit-il. "Ça n'a rien à voir avec les photographies - ça doit être sympa d'avoir un très bon photographe pour les faire, mais c'est de mettre votre famille dans le domaine public et ensuite ils devront gérer cette horrible cacophonie de démons qui vivent sur Internet. Ça ruine vraiment beaucoup de choses, les trolls d'internet, car personne ne veut les contrarier. Même si vous les ignorez et je pense que personne ne peut vraiment les ignorer."
Il n'y a pas de colère dans la voix de Pattinson, juste l'acceptation du pacte inconfortable qu'il a passé avec le diable pour mettre le succès sur sa route . "Avec mes sœurs" - Victoria et Lizzy, toutes les deux plus âgées ; Lizzy, une chanteuse est apparue dans X Factor l'an dernier, atteignant le stade des auditions dans la maison des juges - "Vous entraînez les gens dans quelque chose dont ils n'ont pas demandé à faire partie," continue-t-il. "C'est impossible pour vous de l'arrêtez après. Tout ce que vous pouvez dire c'est : 'Je suis désolé. Je suis désolé d'apporter cette noirceur dans ta vie. Et ça ne t'apporteras rien non plus.' C'est juste mauvais, ouais."
Beaucoup de gens dans le milieu du divertissement et ailleurs veulent vraiment être célèbre. Pattinson cependant, plus que les autres personnages publics que j'ai rencontré, semble désespéré d'être moins connu qu'il ne l'est. Le moment où la célébrité lui était utile est loin derrière lui. Il a déjà plus d'argent qu'il ne peut dépenser. A Los Angeles il a acheté une maison - "qui ressemble à Versailles," l'a t-il décrit - mais a déménagé car les paparazzis campés devant chez lui. Il possède 17 guitares, mais c'est là sa seule extravagance.
"La célébrité est simplement gênante pour Rob," dit Anton Corbijn, qui a travaillé avec de nombreuses superstars, tout d'abord en tant que photographe portraitiste et plus récemment en tant que réalisateur. "On a tourné durant un hiver très froid à Toronto et il y avait des jours où la température atteignait -22°C et il y avait quand même des paparazzis qui grimpaient aux arbres durant toute la journée. Même dans des circonstances extrêmes, au milieu de nulle part, il était suivi. Ça doit être pénible."
Est-ce que Pattinson voudrait être moins reconnaissable, alors ? "Je ne pense pas être encore aussi célèbre," dit-il sans conviction. "Je viens juste de déménager à Londres et la chose qui m'a toujours rendu fou à L.a c'était les photographes. Vous vous fichez d'être pris en photo, mais c'est le fait d'être suivi, de savoir que vous ne pouvez pas y échapper. Mais je suis revenu à Londres et ça n'est pas comme ça."
Vraiment ? "Oui oui. Sauf si vous êtes au Chiltern Firehouse [Ndlt : hôtel de luxe à Londres] ou autre. C'est tout. L'infrastructure n'existe pas ici. Et la presse people - ils sont intéressés par des choses différentes en Angleterre. Ce qui est merveilleux !"
Il nous donne peut-être trop de crédit ici. Les relations de Pattinson sont un aliment de base pour les potins, surtout depuis sa rupture avec Kristen Stewart, sa partenaire dans Twilight, en 2012. Il sort actuellement, et est presque fiancé, à la chanteuse FKA Twigs - d'où le retour à Londres - mais il a assez appris pour réussir à garder profil bas. Quand je soulève le sujet aujourd'hui, il répond avec bonhomie : "Oh ouais, ça. Je viens de découvrir que si vous ne parlez jamais des choses c'est mieux. Mais merci."
L'expérience personnelle de Pattinson, devant supporter Twilight et passer de l'autre côté, semble avoir laissé un intérêt pour les plus petits rouages de la machinerie d'Hollywood. Dans Maps to the Stars, l'an dernier, il jouait un aspirant acteur et écrivain qui est en fait un chauffeur et fait l'amour avec une grande actrice névrotique jouée par Julianne Moore. Dans Life, son personnage Dennis Stock observe ce que l'industrie du film est en train de faire à James Dean. La leçon, dans les deux cas, semble être qu'il n'est pas facile de rester sain d'esprit dans cette industrie.
Pattinson, cependant, voit les choses différemment : ce ne sont pas les stars de cinéma qui sont bizarres, c'est tout le monde. "Je pense que les gens sont assez extrême," dit-il. "Si vous regardez le comportement de n'importe qui, vous verrez beaucoup de dingues. Je peux passer du temps avec ma famille et ça ressemble à un asile psychiatrique." dit-il en rigolant. "Ils se diront : 'Oh, pourquoi dis-tu cela sur nous ?'"
Jouer la comédie, insiste Pattinson, reste un processus où l'on apprend toujours ; il ne l'a jamais étudié et il est devenu Edward Cullen quand il pensait encore vouloir être un musicien plutôt qu'un acteur. Cela le conduit à sous-estimer ses talents. Pattinson regarde rarement ses propres performances - il n'a toujours pas vu le dernier film Twilight - mais il cherche assidûment les commentaires négatifs sur le net. "Je lis les critiques et c'est une chose terrible à faire," admet-il. "C'est une addiction. Et vous ne pouvez lire que les négatives, juste pour attiser votre mauvaise estime de soi, votre haine envers vous-même. Ouais, c'est une habitude bizarre."
"Je ne sais pas si c'est de l'insécurité, mais il est bien plus doué qu'il ne le pense," dit Corbijn. "Evidemment, le succès est venu relativement facilement à Rob avec la saga Twilight et depuis ce temps-là, il a pris des rôles secondaires pour prouver - j'imagine à lui-même - qu'il est un acteur et pas seulement un acteur connu. C'est très courageux de sa part, mais il sous-estime ses qualités. Il est nerveux. Je pense qu'il se rabaisse beaucoup - inutilement à mes yeux."
Corbijn voit en Pattinson "un trouble profond". Est-ce que Pattinson en a conscience ? "Err, ha ha, ouais, en quelque sorte," répond-il. "Parfois. Comme tout le monde je pense, vraiment, mais j'ai vraiment le sentiment d'avoir besoin de prouver quelque chose et je ne suis pas totalement sûr de savoir quoi. Donc c'est probablement ça mon trouble."
Pattinson se tait pendant quelques secondes. "Confusion !" s'exclame-t-il finalement. "Je suis vraiment très confus. J'ai passé toute ma vingtaine en n'ayant aucune idée de ce qui se passait. Et je sens maintenant que je gagne un peu en perspective."
La session d'analyse est presque terminée. Pattinson se dirige vers un piano droit près de la fenêtre et joue distraitement quelques notes. Il a commencé à reprendre des leçons récemment pour la première fois depuis son adolescence. Il pensait qu'il serait plus enthousiaste cette fois-ci, mais la pratique est encore douloureuse. Il ferme le couvercle et termine sa pensée d'il y a quelques minutes.
"De bien des manières, je suis assez fier de continuer à faire ce travail," dit Pattinson. "J'ai commencé un travail par accident quand j'avais 16 ans et pouvoir continuer à le faire, j'ai appris comment le faire bien. Car quand on fait un job involontairement, vous avez l'impression d'être un fraudeur, que l'on va vous rejeter à tout moment. Donc ouais, j'espère m'en débarrasser progressivement et pouvoir faire ce que je veux sans avoir le sentiment de faire semblant. Est-ce que cela a du sens ?"
Avec son intrigante et ambitieuse carrière Post-Twilight, ça a de moins en moins de sens, mais le fait qu'il le pense encore dit beaucoup de choses sur Pattinson.
Traduction : Sabine@therpattzrobertpattinson.blogspot.com
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